HISTOIRE VRAIE, TIRÉE D’UNE CHRONIQUE BYZANTINE DE L’ÉPOQUE, L’HISTOIRE SECRÈTE DE PROCOPE DE CÉSARÉE. SEULS QUELQUES MENUS DÉTAILS ONT ÉTÉ AJOUTÉS.

Dans la première moitié du VIème siècle, Théodora, épouse de l’empereur Justinien, régnait sur l’empire byzantin. Petite, très brune, très belle, l’impératrice était de basse extraction. Issue d’un milieu modeste, elle avait été actrice, danseuse nue, courtisane et avait mené très tôt une vie de dévergondage. Ayant rencontré Justinien vers l’âge de vingt ans, elle était devenue sa maîtresse, puis sa femme, accédant ainsi au trône et partageant avec lui le pouvoir. Méprisée par l’aristocratie en raison de ses basses origines, Théodora avait entrepris de la combattre, d’ébranler son pouvoir et de l’humilier.

Ayant conservé beaucoup d’amies dans le milieu des courtisanes, elle plaça celles-ci à des postes importants et choisit de les donner en mariage à des membres de la noblesse pour empêcher les élites de se reproduire entre elles. À cet effet, elle n’hésitait pas à briser des projets de mariage, fussent-ils très avancés. Telle fut la mésaventure que connut Saturnin. Saturnin était un magistrat de haute naissance, fils d’un Maître des Offices, et il était fiancé à une de ses cousines, une jeune femme de son rang, belle et bien née.

Le jour même où leurs noces devaient être célébrées, Théodora fit arrêter Saturnin et le fit conduire dans une autre chambre nuptiale pour qu’il y épousât la fille de Chrysomallo, sa dame de compagnie, ancienne courtisane comme elle et qui avait déjà entraîné sa fille dans ses débauches. En dépit des larmes et des supplications de Saturnin, ce mariage eut lieu. Lors de la nuit de noces, Saturnin découvrit que son épouse n’était plus vierge et il en fut très mortifié. Il s’en ouvrit à l’un ou l’autre de ses amis, leur faisant part de sa colère. Théodora l’ayant appris, elle envoya ses serviteurs se saisir de Saturnin et le fit conduire devant elle, dans la salle des audiences où elle trônait, entourée de sa cour, avec Chrysomallo et sa fille assise à ses côtés.

Elle apostropha durement le jeune homme, puis adressa un signe de tête à ses serviteurs qui, aussitôt, le dépouillèrent de tous ses vêtements. Sur un autre signal de l’impératrice, ils le courbèrent comme les maitres d’école courbent les élèves indisciplinés ou paresseux pour les corriger. La tête de Saturnin fut coincée entre les cuisses d’un serviteur qui lui maintint les poignets. Les fesses nues du jeune magistrat, écartées, se trouvaient ainsi exposées au regard de toute l’assistance. Un autre serviteur s’empara alors d’une poignée de verges et, sur l’ordre de Théodora, les appliqua vigoureusement sur le postérieur de Saturnin. La fessée fut longue et sévère.

Tout le temps qu’elle dura, Théodora, un sourire cruel sur les lèvres, continuait à invectiver Saturnin, se moquant des cris qu’il ne pouvait réprimer, jouissant de sa douleur et de son humiliation. Enfin, elle fit signe aux serviteurs d’interrompre le châtiment. Sur un nouveau signe de Théodora, ils contraignirent Saturnin à s’agenouiller devant l’impératrice pour lui demander pardon à haute voix. Théodora lui dit : « J’espère que tu as compris la leçon. Cesse tes jérémiades, ne raconte plus de bêtises et surtout, ne t’avise plus à l’avenir de discuter les décisions de ta souveraine. Et maintenant, rentre chez toi ». On ne l’autorisa pas à remettre ses vêtements, de sorte que c’est dans le plus simple appareil que Saturnin dut traverser la ville pour regagner sa demeure, exhibant ses fesses écarlates et zébrées à la vue de tous les passants.